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      Quelque chose dans la Lande
      Huit jours à Calais. Avril 2016
       
       

      auteure : Françoise Dudognon
       

      80 p.
      Format 160 x 210
      Mars 2018
      ISBN : 978-2-916512-41-9
      PVP : 14 € TTC



       
       
       
       
       
       
       

      Présentation de l'ouvrage

      Une expérience forte, marquante : Calais 2016

      Dans le sable, pêle-mêle, des lambeaux de bâche plastique, des éclats de planches, des bras de poupée, des traces noires de foyers.
      Une strate géologique est en train de se former à 
      Calais, France. 
      Une strate lisible qui restera dans notre sol.
      Ce texte est le récit d'une expérience et chaque expérience est unique.

      Il se fonde sur l'authenticité de la relation des faits et des ressentis et ne répond pas à toutes les questions. On espère simplement qu'il pourra, par l'absence de sensationnel, permettre une plus simple appréciation de l'extraordinaire et participer, au 
      retour d'un bon sens et d'une humanité qui se perdent dans les méandres de débats politiques « politicards », entremêlés d'une « information » plus ou moins idéologisée et des fantasmes qu'ils ne manquent pas de faire naître en chacun de nous.
       

       


       
       
       
      L'auteure 

      Françoise Dudognon est née en 1952. 
      Ses parents,  originaires du nord de la Dordogne, ont parlé occitan entre eux toute leur vie. 
      Pendant la guerre de 1939-1945, son grand-père, paysan communiste du Limousin, et sa grand-mère surent rester fidèles à leurs convictions qui résonnaient avec le meilleur de leurs traditions. Elle est, elle-même, profondément enracinée  dans cette région où elle a entamé une carrière d’enseignante en 1975.

      De 1978 à 1987, elle a travaillé aux côtés du réalisateur Jean-Pierre Denis comme coscénariste et costumière d’Histoire d’Adrien, film en occitan sous-titré en français, caméra d’or au festival de Cannes en 1980, comme costumière de La palombière (1983) et coscénariste de Champ d’honneur (1987). Elle a ensuite continué à exercer son métier d’enseignante en Dordogne où elle vit.
       
       

      Illustrations de Jérémy Capanna
       

      « Je dessine depuis plusieurs années pour différents projets d'illustration, dans la ville de Clermont-Ferrand où je vis, et je passe la plupart de mon temps à écrire des histoires, imaginer des personnages et les faire vivre en bande dessinée. 
      J'aime raconter des histoires, dessiner les passants, et me demander ce à quoi ils peuvent bien penser...»




       


       
       
      Quelques extraits
      1.

      Les débuts ne sont pas simples : l'espace est très réduit, les cartons sont innombrables, les sacs ont été éventrés. Le tri est en cours, mais le lieu est désert.

      Une montagne de sacs poubelles noirs pleins de vêtements se dresse contre des palettes, selon trois zones déterminées par critères d'âge. Des cartons s'empilent. Des chaussettes, des pulls, des jouets traînent par terre. 

      Nous ne jetons rien, nous trions, trions, trions, des lots de vêtements de qualité très inégale, certains même ayant été envoyés sales ou mélangés à d'autres articles dont nous ne savons que faire : culottes portées, jouets, biberons… 

      C'est agaçant, mais après tout, est-ce qu'on ne se serait pas débarrassé de ses cartons en pensant que leur contenu est préférable à rien ? C'est l'explication qui me vient à l'esprit quand je me remémore notre discussion d'avant le départ. Nous ne savons que faire de ce que nous rejetons, cela nous encombre, retarde notre travail et gâche notre énergie.
       
       

      2.
       

      De l'autre côté de la petite route s'étale un immense terrain plat. Bras de poupée, bouts de tissus, de papier, de plastique, fragments de bois, chaussures, sont mélangés au sable ; un immense broyeur a dû passer par là.

      Traces d'engins à chenilles, tout est aplani, arasé mais pas nettoyé. Un rat cherche pitance. Ce terrain crie. Seul reste debout au bord de la route un baraquement où sont écrits les mots Jungle books (livres de la Jungle), quel joli nom, quelle merveille, ces lettres de couleur tracées avec soin sur la bâche, sont comme une fleur dans le désert.

      Juste ce mot, juste ce nom, un miracle. Au loin, un édifice en bâches bleues et blanches à silhouette d'église, surmonté d'une croix ; quelques constructions précaires largement taguées de phrases et de dessins se serrent autour.

      Les parois crient. Nous traversons cet espace sur un chemin tracé par des roues de voitures, des gens plutôt jeunes, en baskets ou en tongs malgré la pluie, s'y promènent en devisant tranquillement. Il semble que nous croisons pour la première fois des réfugiés.
       

      3. 
       

      Nous longeons un immense barnum dont on ne peut deviner l'utilité. Nous ne savons pas ce qu'il abrite.

      La Belgium Kitchen ressemble à une maison rurale du Maroc. Elle est carrée, avec une cour intérieure et un portail plein assez haut, qui ferme à clef. La clôture de cette porte est presque symbolique car on peut facilement l'escalader. 

      Les bâtiments qui entourent la cour sont des chambres, tout est en bois. 

      Près de l'entrée une grande tente abrite une dizaine de couchettes. La cour est pavée de palettes qui permettent de marcher au-dessus du sable, mais de plus en plus inégales car elles s'enfoncent. C'est un certain Paco qui a inventé ce lieu, nous disent nos guides qui travaillent ici avec des amis. Paco qui veut soigner les gens avec des plantes car, nous assurent-ils, plus de médecin dans le camp, MSF est parti, l'Auberge des migrants ne donne rien. Pourquoi ? C'est révoltant, accablant ! Mes compagnes s'enflamment, je n'arrive pas à le croire. Nous fumons une cigarette autour de la table, au milieu de la cour, dans le soleil couchant d'une beauté glaciale. Un jeune Belge d'origine marocaine, Ilias, se mêle au groupe.

      Au fur et à mesure de la conversation, il nous apprend que ce sont des élèves d'une école d'architecture qui ont conçu les bâtiments selon une technique de construction rapide expérimentale.
       

      4.
       

      Nous nous enfonçons dans les dunes, le sable est de plus en plus présent, envahissant, collant. Des petits sentiers circulent au sein de l'agglomérat au ras de terre, on tombe quelquefois sur des lieux collectifs où l'on sert du thé et des boissons.

      Les tags sont omniprésents. On va, on vient, absorbé par des occupations dont nous n'avons aucune idée. Au détour du chemin, des conteneurs blancs comme neige s'empilent derrière un grillage blanc d'environ cinq mètres de hauteur, le même qui coupe l'accès aux embarcadères et au port. Le sol est recouvert d'une castine formée de gros grains qui résistent à l'enfoncement dans le sable. Pas un végétal, pas une irrégularité.

      Des poteaux tous les trente mètres supportent un éclairage collectif et des caméras. Tout est blanc. Des haut-parleurs au son nasillard et grésillant diffusent une station de radio française. Musique top 50 et spots publicitaires envahissent l'espace sonore.

      On se croirait dans un film de science-fiction. Je comprends tout à coup que ce sont les fameux logements chauffés mis à la disposition des délogés du camp détruit. 

      5.
       

      Un regret m'étreint à cette idée. Un regret que je n'ose pas m'avouer tellement la misère que j'y ai vue est grande. Mais je pense aussi à la Jungle comme un lieu où, contre toute attente, s'est développé quelque chose qui a la force du champignon fragile parvenant à passer à travers une couche de goudron (oui, ça existe). 

      J'ai vu un lieu subversif où l'on s'organise et qui étanche la soif d'universel et d'essentiel des milliers de jeunes Européens qui s'y précipitent, s'y relaient, s'y relient ; où, malgré la violence qui s'exprime, parfois, suite aux mesures brutales qui tombent sans crier gare, et face à la dureté de la vie, les réfugiés réinventent le lien par nécessité, un endroit où l'on fait communauté de la façon la plus ample qui soit, qui catalyse des forces vives où l'on invente des alternatives aux dégâts du désordre mondial, engendré part la cupidité humaine.

      L'autre côté de la médaille de toute situation extrême et tragique.
      …


       


      SOMMAIRE

      Quelque chose dans la Lande
      Huit jours à Calais. Avril 2016
       

      Dimanche 10   7

      Lundi 11   11

      Mardi 12   23

      Mercredi 13   33

      Jeudi 14   43

      Vendredi 15   49

      Samedi 16    59

      Dimanche 17    69

      Lundi 18   72

      « Souvenir de Calais » 74




       

         
         


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